Meurtre à l’Anglaise – 1951

Meurtre à l’anglaise (1951) — Cyril Hare

Neige, poison et politique sous boiseries anglaises

La neige étouffe les bruits, mais pas les haines. Warbeck Hall, grande maison coupée du monde, retient à Noël une poignée d’invités, un vieil aristocrate à l’agonie, un héritier sulfureux, un ministre socialiste… et un historien réfugié dont le regard perce les défenses. Meurtre à l’anglaise est un huis clos d’apparence classique, monté avec une précision clinique. Sous la belle menuiserie, ça craque : classe, nation, mémoire. On n’est pas seulement dans un « who » ; on autopsie un monde.

Contexte et édition

  • VO : An English Murder, Faber & Faber (1951) ; réédition brochée 2017.
  • VF : Rivages/Noir, traduction de Mathilde Martin (poche 2005, réimpressions récentes).

Personnages

  • Wenceslaus Bottwink : historien juif d’Europe centrale, regard moral et lucide.
  • Lord Warbeck : aristocratie en bout de course, souffle court et maison pleine.
  • Sir Julius : ministre socialiste, cousin qui bouscule le salon.
  • Robert Warbeck : héritier provocateur, braises idéologiques sous la cendre.
  • Sergent James Rogers : présence calme, fil de raison.

Ce que le roman met en jeu

  1. La mécanique du whodunit : indices concrets, mobile nuancé, solution logique.
  2. Le diagnostic social : aristocratie déclinante, État-providence naissant, haines tenaces.
  3. Une écriture sèche et élégante : montage sans bavure, aucun effet gratuit.

Pourquoi le lire aujourd’hui

Parce que l’intrigue tient sans vaciller et que la politique y circule comme un courant d’air froid. Parce que Bottwink, étranger familier, révèle les angles morts d’un pays qui se cherche. Et parce que la neige, décor et piège, impose un temps judiciaire : lent, inéluctable.

En guise de conclusion — ce que j’ai pensé du roman

Ce livre m’a accroché par sa sécheresse élégante. Pas de triche, pas de poudre aux yeux : la logique mène la danse. J’aime la façon dont Hare enferme la politique dans la porcelaine du dîner : un gong, un verre, une phrase, et soudain l’Empire débarque au milieu du potage. Bottwink m’a touché : érudit sans posture, survivant sans pathos, il tient la boussole morale sans hausser la voix. Le dénouement n’épate pas la galerie ; il convainc, ce qui est plus rare.

Je range Meurtre à l’anglaise parmi ces country-house mysteries qui respirent encore : la maison parle, la neige écoute, la société se trahit. Si l’on cherche un classique qui regarde l’Histoire droit dans les yeux sans discours, c’est ici. Pour prolonger l’atmosphère, l’épisode 15 de Chroniques Noires offre un complément sonore sans redite : même décor, autre angle, pas de solution dévoilée.

À vous : l’avez-vous lu ? Comptez-vous le lire ? Racontez votre expérience en commentaire — vos passages marquants, vos réserves, vos surprises. Si vous n’avez pas encore franchi le pas, dites ce qui vous attire (ou vous freine) : époque, ambiance, personnages ? Merci d’éviter les révélations directes ; si besoin, balisez vos messages avec [SPOILER]. On lit tout, on répond, on compare les éditions.

Sources

  • Faber & Faber : An English Murder, réédition 2017 (données éditoriales, résumé, remise en circulation).
  • The Guardian : « Best Crime and Thrillers of 2017 » (mention de la redécouverte du titre).
  • Payot & Rivages (Rivages/Noir) : édition française, traduction Mathilde Martin (informations de catalogue).
  • Mosfilm : téléfilm A Very English Murder / « Чисто английское убийство » (1974), réal. Samson Samsonov, musique Eduard Artemyev.
  • Biographie de Cyril Hare (Alfred A. Gordon Clark) : éléments sur le parcours juridique et le pseudonyme.

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